mardi 22 janvier 2013

Mécanique de fabrication des séries US

Bonjour à tous et bonne année !

Après cette longue absence due à la fin du semestre (dossiers à rendre, vacances, partiels !), j'aimerais faire un focus sur la mécanique de fabrication des séries américaines pour mon retour sur ce blog. On m'en a beaucoup parlé il y a quelques semaines, j'ai lu des articles notamment de l'Express.fr et Lepoint.fr, et j'ai également assisté à un tout nouveau cours : processus de fabrication et d'acquisition des séries US. Passionnant. On a beau savoir que les américains et les français ne font pas les choses de la même façon, c'est très intéressant d'explorer en détail les process qu'ils utilisent et qui fonctionnent si bien.

Retour sur la mécanique américaine ...

La chaine : principal décisionnaire

Aux USA c'est la chaine qui décide du style de la série, du contenu, des vedettes qui joueront dedans, ... De nombreuses études sur les goûts du public sont effectuées avant de commencer à réfléchir à un projet, de même qu'une réflexion sur les séries diffusées les années précédentes pour comprendre les erreurs, les réussites et les attentes des téléspectateurs.

En octobre, chaque année, les chaines lancent des appels à projets aux producteurs. Elles recoivent de très nombreux dossiers à étudier, et choisissent les idées qui leur semblent le plus en adéquation avec les tendances et les désirs actuels. Les textes sont commandés. S'ils sont bons, un pilote est tourné. Sinon, le projet est abandonné.

Le deficit financing

Aux USA, la particularité est qu'un épisode de série coûte plus cher au producteur qu'à la chaine. Le producteur est ainsi beaucoup moins couvert qu'en France et a tout intérêt à vendre sa série le mieux possible à l'international, à faire des produits dérivés, des DVDs, à vendre la série à des chaines du câble etc... pour rentrer dans ses frais. Par exemple, pour un épisode à 2 millions de dollars, la chaîne ne finance qu'1,7 million. Le producteur doit donc générer 300 000 dollars de recettes par épisode, soit un total d'un peu moins de 10 millions de dollars par saison de 24 épisodes.

En avril, le pilote est terminé. les chaines commencent par le présenter aux annonceurs lors de "upfronts". Ce sont de grosses manifestations où les annonceurs décident ou non d'investir dans la chaine qui propose la série. Il est primordial que le pilote soit d'excellente qualité pour convaincre les annonceurs d'investir.

En mai, les producteurs cherchent des financements complémentaires lors des "Screenings" à Los Angeles. C'est lors de cette manifestation que les chaines françaises posent des options sur les séries américaines. Certaines ont des accords avec les majors, comme le droit de premier regard par exemple.


Le show-runner, grand manitou

En juin, les studios commencent à "fabriquer" la série. C'est là qu'intervient le show-runner, le chef de projet en quelque sorte. Il gère la direction à la fois artistique et industrielle de la série, il compose les équipes de scénaristes et les équipes de production.

Un pôle de scénaristes, la "writing room"

Le processus décriture est très différent aux USA. En France, les pratiques sont limitées à cause du droit d'auteur, inaliénable et qui donne à l'auteur un droit sur ce qu'il a écrit, à vie. "Le copyright à l'américaine se prête mieux à l'écriture collective que le régime français des droits d'auteur. Avec le copyright, l'auteur écrit, il est payé, et ensuite il n'a plus de droits sur son scénario" explique Fabrice de la Patellière, directeur de la fiction française sur Canal +

Par ailleurs, les personnages, y compris secondaires, doivent avoir une grande profondeur aux USA. Les scénaristes jouent beaucoup sur la temporalité dans la narrativité, c'est à dire les flash-backs, une voix off, des ellipses qui aident à exprimer les émotions et les actions des personnages. L'enfance du personnage est très utilisée, de même que sa psychologie profonde, des armes supplémentaires qui amènent à l'identification du spectateur aux héros de la série. 

Pour plus de réalisme, on engage également des experts qui aideront à la vraissemblance des détails techniques (médecins, policiers, avocats, ...)

 

Une production en flux tendu

Un épisode est tourné en 7 jours environ. Les tournages commencent courant juillet/août et fonctionnent en flux tendu. C'est à dire que la saison commence avec 3 ou 4 épisodes en stock, et jusqu'en décembre les épisodes sont tournés avec, en simultané, un épisode en préparation, un en tournage, et un en post-production.

Si les audiences sont bonnes, la chaine commande 12 autres épisodes jusqu'en avril/mai.

Et la France alors ?

Si ce modèle était adapté en France, de profondes mutations dans la programmation devraient avoir lieu. En effet, les chaines françaises diffusent généralement deux épisodes de 52 minutes à la suite, contrairement aux USA qui ne diffusent qu'un épisode par semaine, mais qui programment de nombreuses séries à la fois. De même, là où les USA diffusent des séries de 24 épisodes, les français sont frileux à en commander plus de 8. Au delà de la chaine de fabrication, c'est donc toute la logique de programmation qui est différente.

"Pour améliorer la qualité, il faut produire plus et lancer plusieurs projets, car, forcément, il y aura des échecs" déclare un membre de l'IMCA. Et vous, qu'en pensez-vous ?