Je suis allée récemment au séminaire du
CEEA sur les fictions des diffuseurs pour 2013. Passionnant ! Deux jours entiers
à entendre parler des attentes des diffuseurs en matière de fiction française.
Pour une étudiante en Production Audiovisuelle, spécialité TV, comme moi,
c'était l'occasion rêvée d'appréhender mieux l'organisation du service fiction
d'une chaine de TV mais également les contraintes de budget, de format
etc. qui justifient leurs choix et leurs attentes. Vous trouverez ci-après un
compte rendu des interventions auxquelles j’ai pu assister.
BILAN/TENDANCES EN VOLUME ET AUDIENCE DE LA FICTION EN 2012 (chiffres Médiamétrie)
Présenté par Caroline Veunac,
Journaliste spécialisée en fiction télévisée (GQ, UGC Illimité le Mag, …)
La fiction en France (étrangère et
française) se porte bien : elle représente 26% des programmes proposés en
2012. On constate une forte appétence des téléspectateurs pour la
fiction : 19 fictions ont réalisé une audience d’au moins 7 millions de
téléspectateurs en 2012.
Sur les 100 meilleures audiences de
fictions unitaires, 70 sont des fictions françaises et 27 viennent des USA. Sur
les 100 meilleures fictions en série ou collection, 24 sont françaises et 76
viennent des USA.
Les séries américaines conservent donc
largement l’avantage sur les séries.
Quelques exemples de bons scores de la
fiction française en 2012 :
Les unitaires : TF1 avec Merlin 7,4 millions de
téléspectateurs / France 2 avec La smala s’en mêle 6 millions / France 3
avec Assassinée 5,7millions
Les séries : TF1 avec No
limit 7,3 millions / Canal + avec Les revenants 1,6 millions (soit
700 000 de plus qu’Engrenages et 300 000 de plus que Braquo) /
Arte avec Ainsi soit-il 1,7millions
Les séries établies : TF1
avec Joséphine ange gardien 7,5 millions / France 2 avec Fais pas ci
fais pas ça 5,4 millions
Les formats courts : M6 avec
Scènes de ménages 5,6 millions / France 3 avec Plus belle la vie
6 millions / TF1 avec Nos chers voisins 9 millions
La fiction française ne combat pas encore
la fiction US qui fait de meilleures audiences mais les français y sont très
attachés : 7/10 personnes interrogées regardent régulièrement au moins une
fiction française en 2012 (+7points par rapport à 2011) et 50% des
téléspectateurs regardent de la fiction française plusieurs fois par semaine.
Concrètement, « plus on regarde de la fiction française, plus on a
envie d’en regarder » conclut Caroline Veunac.
Les genres favoris des
français sont la comédie (65%) et le polar/suspens (61%, le seul genre en
progression cette année : +5points). Par ailleurs, les français préfèrent
dans l’ordre dans une fiction : l’intrigue, le scénario, l’histoire puis
seulement les personnages, les acteurs et les décors.
Au niveau du format, le 90’ perd du
terrain dans les attentes du public, de même que le 26’ et le 5’. Seul le 52’
gagne des adeptes : il est actuellement au cœur des envies des
téléspectateurs
2012 /2013 : tendances
éditoriales des chaines
Avec la crise économique, les budgets
sont revus à la baisse alors que les français attendent de plus en plus de la
fiction française, ils veulent la même sophistication que les séries US :
Nous avons donc des difficultés en France pour concilier les finances et
l’ambition créative. Il est compliqué d’équilibrer l’audience assurée et le
pari artistique risqué.
Les grandes tendances dans la
fiction française :
Le recours à la coproduction
internationale
Evidemment car les budgets sont
multipliés par le nombre de partenaires. Cela permet également de rentabiliser
le programme grâce aux ventes internationales (optimisation des chances de
vendre le programme) ex : Borgia 1,4 millions de téléspectateurs en
France, 6,2 millions sur ZDF en Allemagne
Canal a consacré 25% de son budget aux
copro en 2012 : XIII (France/Canada) / Le vol des cygognes /
The tunnel (à venir, France/UK), … La copro donne une dimension
plus prestigieuse au programme et accroit son effet à l’international
Généralement ces séries sont gérées par
des show runners de grand renom, et scénarisées en anglais.
Les autres chaines se mettent aussi à la
copro :TF1 avec des projets comme Joe (polar en Anglais avec Jean
Reno (France/UK/Danemark) vendu dans 170 pays avant même la diffusion, dont les
USA, Crossing lights avec Marc Lavoine et Donald Sutherland, une
déclinaison de Taxi tournée à NYC
M6 avec Le Transporteur
France 2 : meurtre au paradis
(copro avec La BBC, mais pas de date de diffusion prévue)
Arte est très à l’aise avec la copro
européenne depuis quelques années : Audisseus (Espagne/Portugal) et
d’autres projets : Babylone, Les hérétiques, ...
Le recours au format court, une
certaine réponse à la crise ?
Ce format permet de baisser les coûts de
production et est très fédérateur. Il reste dans l’air du temps : France 2
prévoit la suite d’Un gars une fille : Parents mode d’emploi
La majorité des programmes courts sont
des comédies sociologiques mais peu à peu d’autres sujets sont envisagés comme
le handicap dans Vestiaire sur France 2, ou Bref sur Canal
On constate une intégration de nouvelles
formes d’écritures, d’éléments feuilletonnants
Les formats de 26’sont également appréciés,
principalement sur Canal + : Kaboul Kitchen / Platane, de
même que les 13’ : Working girls / Les lascars
Le transmedia
Arte est le pionnier avec The Spiral,
série participative avec une plateforme d’enquête simultanée sur
internet. C’est un bon moyen de s’adapter à la consommation délinéarisée
et multi supports et de fédérer le public européen avec une thématique et des
modes de diffusion adaptés, même si les audiences restent confidentielles
France 5 développe Anarchy, une
série transmedia 8x26’ : la chaîne prévoit le lancement d’un jeu en ligne
avant la diffusion, avec une influence sur le déroulement de la série. Le
transmedia permet également de toucher des publics plus jeunes
La scripted reality
Depuis Hollywood girls sur la TNT,
les chaines s’approprient le concept du docu-fiction, le « feuilleton du
réel » : Face au doute sur M6, Le jour où tout a
basculé sur France 2
La scripted permet de baisser le coût des
programmes tout en réalisant potentiellement de grandes audiences
La série comme enjeu en matière de
fiction
Le 52’ regroupe de plus en plus
d’amateurs, c’est l’objet principal de recherche des chaines, notamment
Canal+ : 12 fictions 52’ sont en cours d’écriture dans différents genres
(dont Barbarella, adapté du film)
France 2 : Fais pas ci fais pas
ça / Cain / Main courante / … ainsi que le développement de
séries contemporaines qui fonctionnent très bien comme Les hommes de l’ombre
(20% de PDA pour les épisodes 1 et 2 puis 17% pour les épisodes 3 et
4 avec un coût de l’épisode à 800 000€ contre 700 000€ habituellement)
France 3 : Un village français,
dont la saison 4 a très bien marché. La saison 5 est en cours de développement
France 4 dispose désormais d’un budget
fiction pour toucher un public plus jeune. 4 séries de 52’ sont en
développement, sur des thématiques fantastiques/surnaturelles
Arte : Xanadu / Les invincibles /
Fortune / Ainsi soit-il, le gros succès de 2012. Une case est dédiée le
jeudi soir : plus de 10 projets sont en développement, notamment des
séries en 3 volumes comme le fait la BBC
TF1 reste adepte du 90’ mais s’est mis au
52’ en 2012 avec No limit / Falco. La croisière est en projet
pour 2013
M6 a très peu d’investissements en
fictionDe plus en plus, on constate que les séries sont endurantes sur
plusieurs saisons.
Le rôle des chaines de la TNT
Ces chaines ont des budgets très limités
mais un fort intérêt pour la création originale. Elles apprécient
particulièrement les formats courts et les 26’. Elles disposent d’une
forte liberté dans le ton/ sur la ligne artistique. Ce sont des chaines
plus jeunes, où il y a plus d’opportunités.
NRJ12 produit le 52’ L’été où tout a
basculé. Elle a pour objectif de produire un soap quotidien,
adaptation d’une télénovela. En 2013, elle lancera C’est la crise,
avec Anne Roumanoff
D8 adapte les Infidèles (le film)
en 80 épisodes de shortcom, intitulés Flag
NT1 lance VDM (vie de merde) en
shortcom
HD1 lance 2 projets de shortcom : Ma
meuf et Ce qui en me tue pas me rend plus folle
On constate un certain dynamisme à la TV
française malgré le contexte économique, et une volonté de création originale.
Le nombre croissant d’acteurs est une opportunité pour les auteurs.
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