jeudi 15 novembre 2012

Quand la Scripted Reality divise la France...

La "scripted reality". Inconnu il y a quelques mois à peine, ce mot envahit progressivement toutes les bouches. Dans cette crise de genre, chacun essaye de se faire entendre et de défendre ses intérêts. Ce type de programme, nouveau en France et qui déchaine les passions, sera étudié très prochainement par le CSA. Retour sur la polémique de la semaine.

La "scripted reality" : Kézako ?

La fiction du réel (“scripted reality”), est un format hybride qui se produit pour des coûts bien plus bas que la majorité des programmes actuels. C'est un format rentable qui allie fiction, magazine et téléréalité. Les programmes de scripted reality inondent les chaînes françaises, suscitant une grande inquiétude chez les producteurs et scénaristes qui dénoncent leur manque de qualité. Les plus connus sont Le jour où tout a basculé sur France 2, Au nom de la vérité sur TF1, Si près de chez vous sur France 3, Face au doute sur M6, ... En bref, la “scripted reality” fait aujourd'hui partie du programme quotidien d’une grande partie des chaînes publiques et privées. Le concept basique: des faits réels ou divers sont joués par des comédiens.

Scripted, fiction or not fiction ? De gros enjeux ...

La grande question est la suivante : ce format peut-il être considéré comme étant de la fiction? Si oui, il pourrait entrer dans les quotas de fictions des chaînes et bénéficier de l’aide à la production du CNC. Certaines chaînes ont déjà commencé à les présenter au CSA en tant que fiction, afin de remplir leurs quotas imposés. Cela inquiète les professionnels de la fiction qui craignent que ce nouveau format bon marché n’entraîne une baisse de la production d’oeuvres patrimoniales (fiction, documentaire, dessins animés…).

Comme beaucoup d'autres acteurs du secteur, Guillaume Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) réclame une “vraie réflexion pour savoir si effectivement il s’agit de fiction”.

Les acteurs du secteur pour l'accession de la scripted au rang de fiction

- Françoise Laborde, membre du CSA, a déclenché un tolé chez les professionnels de la fiction en se déclarant favorable à l'accession de la scripted au rang de fiction.“Dans la mesure où il y a un décor, un scénario, un réalisateur et des acteurs, il nous est apparu que la scripted reality pouvait s’assimiler à de la fiction, et nous avons estimé que ce genre pouvait effectivement entrer dans les obligations des chaînes”, a-t-elle déclaré mi-octobre à Satellifax
- Julien Courbet, pionnier du genre et producteur de Le jour où tout a basculé, met en avant les économies réalisées à la production et l'opportunité d'emploi dans une France en crise dans une interview récente pour Le Point: "je voudrais la convaincre des bienfaits de ce nouveau mode narratif à bas coût au moment où France 2 doit faire 20 millions d'euros d'économies sur sa grille de programmes l'an prochain. Avec Le jour où tout a basculé, ma société de production a délivré 21 000 bulletins de paie journaliers depuis un an et demi ! On fait travailler 1 700 comédiens, une équipe de 30 auteurs et autant de réalisateurs. C'est un vivier pour l'avenir ! Mieux vaut produire français que de faire un chèque aux Allemands ! Car si on supprime Le jour où tout a basculé, France 2 remettra à l'antenne des fictions allemandes comme avant."
- Nonce Paolini, patron du groupe TF1 ne comprend pas bien le débat "Il n'y a qu'en France qu'on se pose cette question. Il n'y a pas un autre pays au monde où on se pose cette question, puisque des producteurs en vivent, des acteurs, souvent de jeunes acteurs y montrent leur talent, de jeunes auteurs peuvent s'exercer à l'exercice audiovisuel et par ailleurs le public semble y trouver un intérêt. Ici, c'est un débat. On est en train de perdre du temps alors que ce sont des objets audiovisuels qui méritent d'entrer dans la catégorie fiction

Les acteurs du secteur contre l'accession de la scripted au rang de fiction

À l’opposé, ces programmes ne sont pas du tout du goût des producteurs de fiction, qui craignent que les chaînes ne réduisent du coup leurs commandes d’œuvres patrimoniales (fiction, documentaire, dessins animés…)

- Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture, est également contre ce genre. Au cours d'une émission sur France Inter, elle s'est prononcée pour la suppression des programmes de scripted sur France Télévisions. "La scripted reality n'a pas sa place sur le service public. Ma priorité c'est de définir une télévision de service public qui soit la meilleure pour les Français. On est dans une offre audiovisuelle avec une multiplication des chaînes. Les gens ne peuvent plus se répérer (...) La scripted reality n'est pas un type d'émissions de qualité qui correspond aux objectifs du service public"
- Juliette Prissard-Eltejaye, déléguée générale du Syndicat des producteurs indépendants (SPI) : “Nous ne considérons pas la scripted reality comme une oeuvre patrimoniale. Les chaînes utilisent tous les codes de la téléréalité et du reportage, tout en l’habillant en fiction pour la faire rentrer dans les quotas”

Guillaume Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes de la SACD est également contre la catégorisation de la scripted comme fiction. “Si c’est le cas, il faut fixer des règles minimales en terme de création et de rémunération. On voit des rémunérations de scénarios choquantes, en deçà de ce qui peut exister dans la fiction. On n’est pas loin de l’exploitation sur certains programmes”. Pour lui, considérer la “scripted reality” comme une fiction risque de “briser le retour en force des séries et unitaires de fiction française”.

Délibérations du CSA
L'appartenance de la scripted à la catégorie des oeuvres audiovisuelles est en réalité d'une question de gros sous puisque ces dernières ont droit à une aide financière du CNC. Il s'agit également d'une rivalité entre les producteurs de fiction (habituels producteurs des oeuvres audiovisuelles) et les producteurs de flux qui produisent ces programmes de scripted reality.

Pour arbitrer le débat et faire face à l’inquiétude du secteur, le CSA a décidé d’organiser en novembre des auditions de scénaristes, producteurs et chaînes TV pour “s’informer des préoccupations des uns et des autres”Les auditions démarreront le 19 novembre et se termineront début décembre. Elles seront menées par Francine Mariani-Ducray et Françoise Laborde, respectivement présidente et vice-présidente de la commission production audiovisuelle au CSA.“Nous ne nous prononçons jamais sur la qualité des oeuvres”, a toutefois prévenu Francine Mariani-Ducray.


Sources : TVobs.com, AFP, L Croix, Ozap, Lepoint.fr 

2 commentaires:

  1. moi je me dis que ça va passer ils sont en train de nous inonder avec, c'est de la merde mais apparemment on aime ça..

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  2. Effectivement les scripted reality sont un moyen de s'entraîner ; je vous invite à découvrir une parodie qui traite du débat avec humour !
    http://youtu.be/O0jt56NaAK4

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