La "scripted reality". Inconnu il y a quelques mois à peine, ce mot envahit progressivement toutes les bouches. Dans cette crise de genre, chacun essaye de se faire entendre et de défendre ses intérêts. Ce type de programme, nouveau en France et qui déchaine les passions, sera étudié très prochainement par le CSA. Retour sur la polémique de la semaine.
La "scripted reality" : Kézako ?
La fiction du réel (“scripted reality”), est un format hybride qui se produit pour des coûts bien plus bas que la majorité des programmes actuels. C'est un format rentable qui allie fiction,
magazine et téléréalité. Les programmes de scripted reality inondent les chaînes françaises, suscitant une
grande inquiétude chez les producteurs et scénaristes qui dénoncent leur
manque de qualité. Les plus connus sont Le jour où tout a basculé sur France 2, Au nom de
la vérité sur TF1, Si près de chez vous sur France 3, Face au
doute sur M6, ... En bref, la “scripted reality” fait aujourd'hui partie du programme quotidien d’une
grande partie des chaînes publiques et privées. Le concept basique: des faits
réels ou divers sont joués par des comédiens.
Scripted, fiction or not fiction ? De gros enjeux ...
La grande question est la suivante : ce format peut-il être considéré comme étant de la fiction?
Si oui, il pourrait entrer dans les quotas de fictions des
chaînes et bénéficier de l’aide à la production du CNC. Certaines chaînes ont déjà
commencé à les présenter au CSA en tant
que fiction, afin de remplir leurs quotas imposés. Cela inquiète les professionnels de la
fiction qui craignent que ce nouveau format bon marché n’entraîne une
baisse de la production d’oeuvres patrimoniales (fiction, documentaire,
dessins animés…).
Comme beaucoup d'autres acteurs du secteur, Guillaume
Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes de la
Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) réclame une “vraie réflexion pour savoir si effectivement il s’agit de fiction”.
Les acteurs du secteur pour l'accession de la scripted au rang de fiction
- Françoise Laborde, membre du CSA,
a déclenché un tolé chez les professionnels de la fiction en se
déclarant favorable à l'accession de la scripted au rang de fiction.“Dans la mesure où il y a un décor, un scénario, un réalisateur et des acteurs,
il nous est apparu que la scripted reality pouvait s’assimiler à de la
fiction, et nous avons estimé que ce genre pouvait effectivement entrer
dans les obligations des chaînes”, a-t-elle déclaré mi-octobre à Satellifax.
- Julien Courbet, pionnier du genre et producteur de Le jour où tout a basculé, met en avant les économies réalisées à la production et l'opportunité d'emploi dans une France en crise dans une interview récente pour Le Point: "je voudrais la convaincre des
bienfaits de ce nouveau mode narratif à bas coût au moment où France 2
doit faire 20 millions d'euros d'économies sur sa grille de programmes
l'an prochain. Avec Le jour où tout a basculé, ma société de
production a délivré 21 000 bulletins de paie journaliers depuis un an
et demi ! On fait travailler 1 700 comédiens, une équipe de 30 auteurs
et autant de réalisateurs. C'est un vivier pour l'avenir ! Mieux vaut produire français que de faire un chèque aux
Allemands ! Car si on supprime Le jour où tout a basculé, France 2 remettra à l'antenne des fictions allemandes comme avant."
- Nonce Paolini, patron du groupe TF1 ne comprend pas bien le débat "Il n'y a qu'en France qu'on se pose cette question. Il
n'y a pas un autre pays au monde où on se pose cette question, puisque des
producteurs en vivent, des acteurs, souvent de jeunes acteurs y montrent
leur talent, de jeunes auteurs peuvent s'exercer à l'exercice
audiovisuel et par ailleurs le public semble y trouver un intérêt. Ici,
c'est un débat. On est en train de perdre du temps alors que ce sont des
objets audiovisuels qui méritent d'entrer dans la catégorie fiction"
Les acteurs du secteur contre l'accession de la scripted au rang de fiction
À l’opposé, ces programmes ne sont pas du tout du goût des producteurs
de fiction, qui craignent que les chaînes ne réduisent du coup leurs
commandes d’œuvres patrimoniales (fiction, documentaire, dessins
animés…)
- Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture, est également contre ce genre. Au cours d'une émission sur France Inter, elle s'est
prononcée pour la suppression des programmes de scripted sur
France Télévisions. "La scripted reality n'a pas sa place sur le service public. Ma
priorité c'est de définir une télévision de service public qui soit la
meilleure pour les Français. On est dans une offre audiovisuelle avec
une multiplication des chaînes. Les gens ne peuvent plus se répérer (...) La scripted reality n'est pas un type d'émissions de qualité qui correspond aux objectifs du service public"
- Juliette Prissard-Eltejaye, déléguée générale du Syndicat des producteurs indépendants (SPI) : “Nous ne considérons pas la scripted reality comme une oeuvre patrimoniale.
Les chaînes utilisent tous les codes de la téléréalité et du reportage,
tout en l’habillant en fiction pour la faire rentrer dans les quotas”
- Guillaume
Prieur, directeur des affaires institutionnelles et européennes de la
SACD est également contre la catégorisation de la scripted comme fiction. “Si c’est le cas, il faut fixer des règles minimales en terme de création et de rémunération.
On voit des rémunérations de scénarios choquantes, en deçà de ce qui
peut exister dans la fiction. On n’est pas loin de l’exploitation sur
certains programmes”. Pour lui, considérer la “scripted reality” comme une
fiction risque de “briser le retour en force des séries et unitaires de fiction française”.
Délibérations du CSA
L'appartenance de la scripted à la catégorie
des oeuvres audiovisuelles est en réalité d'une question de gros
sous puisque ces dernières ont droit à une aide financière du CNC. Il
s'agit également d'une rivalité entre les producteurs de fiction (habituels
producteurs des oeuvres audiovisuelles) et les producteurs de flux qui
produisent ces programmes de scripted reality.
Pour arbitrer le débat et faire face à l’inquiétude du secteur, le CSA a décidé d’organiser en novembre des auditions de scénaristes, producteurs et chaînes TV pour “s’informer des préoccupations des uns et des autres”. Les auditions démarreront le 19 novembre et se termineront début décembre. Elles seront menées par Francine Mariani-Ducray et Françoise Laborde, respectivement présidente et vice-présidente de la commission production audiovisuelle au CSA.“Nous ne nous prononçons jamais sur la qualité des oeuvres”, a toutefois prévenu Francine Mariani-Ducray.
Sources : TVobs.com, AFP, L Croix, Ozap, Lepoint.fr
moi je me dis que ça va passer ils sont en train de nous inonder avec, c'est de la merde mais apparemment on aime ça..
RépondreSupprimerEffectivement les scripted reality sont un moyen de s'entraîner ; je vous invite à découvrir une parodie qui traite du débat avec humour !
RépondreSupprimerhttp://youtu.be/O0jt56NaAK4